Comprendre la respiration buccale : un trouble souvent négligé
La respiration buccale, c’est lorsque l’on respire principalement par la bouche plutôt que par le nez, que ce soit de jour ou de nuit. Bien que cette habitude semble anodine, elle peut avoir un impact significatif sur la santé générale et, en particulier, sur la santé bucco-dentaire. Beaucoup de personnes, en particulier chez les enfants, respirent ainsi de manière inconsciente en raison d’obstructions nasales chroniques, d’allergies, d’amygdales hypertrophiées ou encore d’une mauvaise posture linguale.
Ce mode de respiration altère l’équilibre naturel et les fonctions physiologiques de la cavité buccale. Il est donc essentiel d’en comprendre les conséquences, aussi bien sur la dentition que sur la croissance faciale et la santé globale, et surtout de savoir comment y remédier.
Les effets néfastes de la respiration buccale sur la santé dentaire
Une respiration prolongée par la bouche perturbe l’écosystème buccal. L’air inhalé directement par la cavité buccale entraîne une sécheresse orale, pourtant la salive joue un rôle clé dans la régulation de la flore bactérienne et la prévention des maladies.
Les principales conséquences bucco-dentaires incluent :
- Xérostomie (sécheresse buccale) : Une bouche sèche due à une évaporation accrue de la salive augmente le risque de caries dentaires et de maladie parodontale.
- Mauvaise haleine (halitose) : L’absence de salive suffisante empêche l’élimination des bactéries responsables des odeurs.
- Développement de caries : Une bouche sèche ne neutralise plus les acides produits par les bactéries cariogènes. Cela accélère la déminéralisation de l’émail.
- Inflammation gingivale et parodontite : La salive agit comme un tampon contre les infections. Sa diminution favorise l’inflammation des gencives.
- Altération du développement maxillo-facial : Chez les enfants, la respiration buccale influence la croissance des mâchoires, pouvant entraîner une mâchoire étroite, un palais ogival et une mauvaise occlusion dentaire.
À long terme, cette respiration peut aussi aggraver les désordres temporo-mandibulaires (DTM) ou provoquer des troubles du sommeil comme l’apnée obstructive. D’un point de vue orthodontique, de nombreux praticiens recommandent un diagnostic précoce.
Les signes qui doivent alerter
Il existe plusieurs signes cliniques qui orientent vers une respiration buccale chronique, notamment chez l’enfant :
- Bouche constamment ouverte, surtout pendant le sommeil
- Ronflements fréquents
- Voix nasillarde ou bouche sèche au réveil
- Fait de dormir avec la tête en arrière, souvent en position assise
- Présence d’une haleine forte malgré une bonne hygiène buccale
- Visage allongé ou mâchoire étroite
En présence de ces symptômes, une consultation auprès d’un dentiste, d’un orthodontiste ou d’un ORL s’impose pour évaluer les causes et envisager une prise en charge adaptée.
Les effets sur la posture et l’articulation dentaire
La respiration buccale modifie l’équilibre oro-facial, notamment la posture de la langue. Habituellement, la langue repose contre le palais, contribuant à une bonne croissance palatine. Mais lorsqu’elle reste basse dans la bouche à cause d’une respiration par la bouche, cela peut entraîner :
- Un palais étroit et profond (palais ogival)
- Des dents mal alignées nécessitant un traitement orthodontique
- Des troubles de l’équilibre postural (épaule, nuque, dos)
Des études en orthodontie et en orthophonie ont confirmé que la respiration buccale, si elle n’est pas traitée tôt, est un facteur de malocclusion dento-faciale. (Source : Revue d’orthodontie française – Société française d’orthopédie dento-faciale).
Comment traiter la respiration buccale efficacement ?
Heureusement, il est possible de corriger la respiration buccale et d’en limiter les conséquences, grâce à une approche pluridisciplinaire. Le traitement dépendra de la cause sous-jacente :
- Traitement des causes obstructives : Si une obstruction nasale est présente (hypertrophie des amygdales, des végétations adénoïdes, déviation du septum nasal), une prise en charge médicale ou chirurgicale peut être recommandée, notamment chez les enfants (Source : HAS – Haute Autorité de Santé sur le traitement de l’apnée du sommeil chez l’enfant, 2020).
- Rééducation myofonctionnelle : L’intervention d’un orthophoniste permet de corriger la posture linguale et de réapprendre une respiration nasale via des exercices spécifiques. Cette thérapie est efficace chez les enfants comme chez les adultes.
- Traitement orthodontique : En cas de conséquences de la respiration buccale comme une occlusion dentaire anormale ou un palais étroit, l’orthodontiste pourra proposer un appareillage (expanseur palatin) accompagné d’un suivi fonctionnel.
- Hygiène bucco-dentaire renforcée : Utilisation de bains de bouche sans alcool, hydratation régulière, accès renforcé aux soins dentaires pour prévenir les complications.
- Utilisation de dispositifs de rééducation : Certains dispositifs intra-oraux peuvent corriger la position de la langue et favoriser le retour à une respiration nasale. Il existe des produits en pharmacie, mais un avis professionnel est essentiel pour garantir leur efficacité.
Prévenir les complications dès le plus jeune âge
La détection précoce chez l’enfant est primordiale. Les dentistes et les pédiatres sont bien placés pour repérer les signes d’alerte dès les premières années de vie. De plus en plus d’écoles primaires en France mettent en place des campagnes d’information sur la respiration et la santé bucco-dentaire, en coordination avec les services de santé scolaire.
En tant que parent, l’observation du sommeil de l’enfant, de son comportement diurne (fatigue chronique, agitation, besoins de respirer par la bouche même au repos) ainsi que la vigilance sur les éventuels retards de langage sont autant de signaux à surveiller.
Un suivi régulier chez le dentiste tous les six mois permet aussi de détecter plus en amont les conséquences de ce trouble.
Vers une meilleure santé respiratoire et bucco-dentaire
La respiration nasale, bien plus que simple habitude, est essentielle au bon fonctionnement du corps humain. Elle filtre et humidifie l’air, régule la pression intra-thoracique, et protège la sphère bucco-dentaire. La respiration buccale, en rompant cet équilibre, peut engendrer une cascade de problèmes si elle n’est pas prise au sérieux.
Adopter une approche préventive et globale, récompensée par des soins adaptés et une meilleure éducation à la santé, permet d’agir tôt. Dès les premières années de vie, il est possible d’aider les enfants à développer une respiration fonctionnelle afin de favoriser une croissance harmonieuse du visage, une bouche saine, et un sommeil réparateur.
En prêtant attention à notre mode de respiration, nous faisons un pas important vers une meilleure santé générale, une dentition plus saine, et un confort de vie durable.